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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 10 novembre 2017 jour enraciné

Denis Vallier

   Nous effleurons à peine la surface des choses et du monde, mais nos racines sont profondes...

   En fait, l’écriture est une question de famille où se mêlent des racines de la naissance, de l’amour, du pouvoir, de la mort, et de l’héritage. Avec de telles racines, on n’est jamais seul avec soi-même, quel que soit l’isolement que requiert l’écriture, mais prétendre au sublime est sacrément puéril et carrément grotesque. Le sublime est une expérience sensible de l’homme qui se trouve confronté à un univers qui le domine et l’écrase comme un pouce écraserait une fourmi, bien peu s’en relèvent. Qui se frotte au sublime des cimes est proche de la chute. Zarathoustra ne disait-il pas que pour qu'un arbre soit haut et fort, il lui faut des racines qui lui soient profondes ? Nos racines défoncent les tombes et nous nourrissent de nos morts. Nous les devinons à peu près, les esprits faibles s’y perdent, mais, à rebours, où est donc notre cime ? Quels cieux visons-nous ?

    Toute hirondelle retourne à son nid. De mensonge en trahison, de révélation en partage, chacun se débat pour s’affranchir de son passé et se construire un avenir. Souvent pour leurs plus belles joies, mais aussi, parfois, pour leur plus grand malheur, ceux qui font ce chemin sont à jamais différents.

Page du 10 novembre 2017 jour enraciné

   

   L’homme qui veut à tout prix apprendre se situe lui-même dans un espace flottant entre, d’un côté, une sorte de panthéon là-haut où des dieux connaissant leur savoir et, sachant qu’ils savent, n’ont plus le goût d’apprendre et de l’autre côté, un monde animal, une ignorance qui s’ignore elle-même et n’a pas encore eu l’idée d’apprendre… Pour nous éloigner de l’animal, nous avons inventé ces dieux pour qu’ils nous apportent les réponses. Elles nous effrayent trop pour que nous nous les donnions nous-mêmes. L’homme sait qu’il ignore et qu’il ignorera mais il n’est pas certain qu’il ne saura jamais, il garde espoir : il a suffisamment de savoir et d’ignorance en lui pour avoir le goût d’apprendre, alors il apprend.

   C’est une vision charmante et antique de notre condition, mais le grotesque du fond des grottes se fait souvent le complice du sublime dans l’héritage que nous ont légué nos grands anciens : Vinci, Rabelais, Cervantès, Shakespeare, Victor Hugo... Ces êtres hors du commun ne se sont pas développés en obéissant à une logique ou à un plan tracé par des maîtres. Ils ne se sont pas développés de manière académique, mais dans des explosions volcaniques, d’une façon anarchique, imprévue, par des rafales de vent ou de génie créateur. Les volcans, même s’ils ont l’âge de leurs cratères, sont généreux en produits d’exception

   Pour que la multitude que nous sommes s’individualise et devienne indépendante à son tour, il nous faudrait un travail herculéen et le ciseau prolixe du sculpteur Phidias. C’est l’ambition de Don Quichotte. Par-delà les siècles Don Quichotte demeure LA sculpture équestre suprême, c’est lui-même et Rossinante, le centaure chrétien légué par la mythologie grecque et la civilisation ibérique qui chemine à nos côtés. Nous avons là-haut, bien en vue, Camoes, Homère et Cervantès au sommet d’une pyramide érigée par Victor Hugo et nous continuons à fixer les platitudes de nos écrans de nos regards vides…

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