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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 10 mars 2019 jour du passe-murailles

Denis Vallier

      Depuis toujours, tous les enfants se font une idée du monde dans lequel ils vivent par de multiples expériences, du moins avant l’apparition du smartphone et des tablettes... Ils testent de diverses manières l’espace, le temps et la matière afin de s’en faire une représentation plausible. Aussi, je me souviens parfaitement de mes doutes aux alentours de mes dix-onze ans à la lecture du Passe-murailles de Marcel Aymé même si j’en acceptais volontiers le fantastique et l’hommage à la puissance de l’esprit, même celui d’un petit employé falot… Je ne me souviens plus précisément de mes interrogations mais j’ai dû me demander si Dutilleuil alias Garou Garou ne pouvait traverser que les murs ou comment faisait-il pour marcher dans la rue sans s’enfoncer inexorablement… c’est beau une telle volonté et un contrôle de soi aussi absolu mais en faisant l’amour, l’instant critique de la petite mort pourrait être tragique. Il n’avait pas non plus intérêt à être somnambule au risque de disparaître au cours d’un mauvais rêve dans les profondeurs obscures et brûlantes. Un gamin sait bien qu’un mur est dur pour s’y être cogné mais voici que la science s’en mêle et lui dit que ce qu’il perçoit et ressent n’est pas la réalité, que ses bosses ne sont pas une fatalité, que le monde est bien plus complexe qu’il n’y paraît à première vue. D'après la mécanique quantique (branche de la physique qui a pour but d'expliquer le comportement des particules dans l'Univers), si vous vous lancez contre un mur solide, la probabilité que vous passiez au travers est évidemment ridiculement faible, mais elle n'est pas nulle. Mon brave mécanicien très peu quantique, qui fait aussi dans la carrosserie, est partisan d’essayer. Ceci s'appelle l'effet tunnel, phénomène qui permet à des particules de franchir une barrière. Et la probabilité de rester coincé dedans n'est pas nulle non plus. Je veux bien y croire, mais, pour avoir involontairement tenté le coup, je peux vous certifier que c’est n’importe quoi, que ce n’est qu’une vue de l’esprit : c’est un attrape-nigaud et, si la chirurgie esthétique fait des miracles, elle a ses limites...

      Mais n’en restons pas qu’aux impressions, il nous faut malgré tout chercher à comprendre pour ne pas mourir idiot… Le plus simple (si l’on peut dire ...) pour que des béotiens de mon genre se représentent ce que veulent nous signifier nos savants, c'est de s'imaginer qu'une particule (disons un électron pour rester en territoire « connu ») n'est pas un point infime qui tournicote à tout va autour d’un noyau d’atome mais un petit nuage diffus où l’électron apparaît et disparaît tout le temps. Ce petit nuage s'approche d'une barrière qui comme toutes les barrières a des interstices et commence à la traverser. Si ce nuage est plus large que les interstices l’électron peut être à un moment d'un côté de la barrière, disparaitre et réapparaitre de l'autre côté (toujours dans le nuage). Ça marche ou ça ne marche pas en fonction de la taille du nuage et de l’épaisseur de la barrière et de la largeur des interstices. La physique à cette échelle c'est de la probabilité, des nombres, et c’est tout bonnement incompréhensible : le cerveau humain lambda est un objet macroscopique adapté et sans doute surdimensionné par rapport à son environnement macroscopique puisqu’il est fait pour. Il n’appréhende aisément, pour certains du moins, que son environnement macroscopique. La réalité n’est sans doute pas ce que l’on voit dès qu’on l’aborde au niveau des particules mais même si elles laissent quelques traces fugitives sur des écrans, les particules ne sont pas de notre monde perceptible, elles sont avant tout dans nos têtes, surtout les grosses. Je veux bien croire nos hommes de science qui n’avancent que pas à pas et après de multiples vérifications contrairement aux charlatans, mais j’hésite à leur accorder une confiance absolue puisque, malgré tout, ce ne sont que des hommes habités par encore plus de doutes et d’interrogations que les autres. Qui accepterait de renouveler encore et encore l’expérience et se lancer contre un mur tête baissée même casquée jusqu’à ce que les grands nombres leur donne raison ? Tout au long de l’histoire, des théories se sont succédées et des certitudes se sont révélées fausses, pourquoi donc celles qui font loi de nos jours, et dont on rira peut-être demain, ne subiraient-elles pas le même sort quand de nouvelles informations seront disponibles ?

Page du 10 mars 2019 jour du passe-murailles
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