Page du 14 juillet 2019 jour des questions sans réponse.

      Le temps, on le passe, on le prend, on le perd. Proust (- ou du moins son personnage) voulait à tout prix retrouver le temps perdu, mais que faire alors de ce si peu de temps perdu et domestiqué enfermé au milieu de tant de temps libres et sauvages ? Quand le temps se fait long, ce qui n'arrive pas est-il de l'ordre de l'acte manqué ? Ce qui n'arrive pas est-il en attente d'une nouvelle chance quelque part ? Ou bien faisait-il partie des "possibles" qui se sont égarés, tués par les choix ? Autant en emporte l'instant!

      Le temps est d’une indifférence absolue et se fiche de l’heure qu’il est comme de sa première microseconde… à propos, quelle heure est-il ? La réponse de notre montre (- quel curieux déverbal !…) paraît simple et évidente mais cette convention est toute relative sauf pour les Anglais qui prennent leur thé à Greenwich… Par exemple, quelle heure est-il si l’on est pile poil au Pôle Nord ? Bien malin qui répondra… En nous y mettant tous et en cherchant bien, trouverons-nous midi à 14 heure ? Le temps, c’est avant tout une question sans réponses. Que dis-je, ce sont des milliers de questions qui se bousculent au portillon… L’horloge sonne l’heure mais quel bruit fait le temps qui passe ? Est-ce que passer le temps c’est le filtrer ? Quand on passe son temps à tuer le temps, où l'enterre-t-on ? Jugera-t-on ceux qui tuent le temps ou suffit-il d’attendre que le temps se venge ? Peut-on autopsier les temps morts ? Qui a tiré sa flèche et vers quoi? A-t-il plusieurs arcs à sa flèche ? Le monde, est-ce le temps ? Le temps se déroule-t-il ou s'enroule-t-il sur lui-même ? Le temps est-il limité à la notion de durée ? Le temps qui est de l'argent, quand il nous passe sous le nez,  est-ce qu’il n’a réellement pas d'odeur depuis Vespasien ?... Time is mon nez !

      Est-ce le temps qui bouge ou est-ce nous qui avançons ? Si le monde est immobile et que le temps se déroule, rien d'étonnant à ce que j’ai un problème et que je me pose des questions : je suis le problème. La première étape dans la résolution d’un problème est de reconnaître qu’il y en a un. La difficulté, c’est que nous sommes immergés dans le temps et qu’on ne peut donc jouer le rôle d'observateur impartial qui regarderait tout ça de l'extérieur comme l’aurait voulu Proust… Si tous nos mots ont une étymologie et portent en eux l'écoulement du temps depuis leur origine, ils sont du temps en conserve. Pas moyen d’en sortir ! Ils sont le miroir de l’évolution de notre pensée mais ne pourront jamais apporter le début de l’esquisse d’une réponse.

(Photo de monstre)