Page du 11 octobre 2019 jour des chaussettes sales
Etant gamin, je faisais de la luge en octobre, maintenant je me baigne… Il y a pire comme malheur mais je sens bien que quelque chose ne vas pas. Tous, tant que nous sommes, sommes responsables, chacun à son échelle, du dérèglement climatique et de la dégradation de notre milieu… je m’en doute, mais j’ai pourtant la violente tentation de clamer mon innocence. Comment ça, moi ! Qu’est-ce que j’ai à voir avec tout ça ? Ce n’est quand même pas ma petite bagnole qui pollue l’atmosphère, ce ne sont pas mes quelques vols en avion qui ont fait fondre la banquise ni mes quelques courses au supermarché qui chamboulent l’économie mondiale… En principe, il n’y a pas besoin d’être un avocat exceptionnel pour défendre un innocent de mon genre. Je ne suis qu’un pauvre type insignifiant par rapport à toute une planète, à peine quelques atomes profitant du soleil ; un point, ce n’est rien par définition. Malgré tout, j’appelle volontiers à la rescousse Voltaire qui, dans Zadig, écrivait magistralement qu’"il vaut mieux hasarder de sauver un coupable que de prendre le risque de condamner un innocent". Passez donc votre chemin oiseaux de mauvaise augure, mais les Khmers rouges disaient exactement le contraire… Comme aucun raisonnement, ni aucun jugement, ne sont infaillibles, je demande pour le moins le bénéfice du doute. Rassurez-moi : le droit (- que tout le monde est censé connaître) mérite bien de l’emporter sur le bien (- que tout le monde ignore). Non ? Le monde n’est quand même pas peuplé que de Khmers rouges ! De toute façon, coupable ou pas, Saint-Augustin n’a-t-il pas dit : "Ne désespérez pas : un des deux larrons fut gracié. » ? Mais il a précisé lucidement : « Ne vous faites pas d’illusion : l’autre fut damné."…
Mon cri de dénégation, repris par des milliards de gorges, c’est le cri de Job, du juste frappé par le malheur et qui ne comprend pas pourquoi ça lui tombe dessus. C’est une voix sans écho privée de la parole, juste un bruit de fond, un borborygme incompréhensible… On dit que seulement dix personnes au monde comprenaient Einstein de son vivant…Moi, je ne suis qu’un zozo parmi les autres, un moins que rien, mais dans mon cas, c’est bien plus impressionnant qu’Einstein, personne ne me comprend et pourtant, je suis loin d’être un génie… Pour être un génie, il ne suffit pas d’avoir raison contre tout le monde, il faudrait en plus que je me montre brillant et déterminé et ça, ce n’est pas demain la veille… Les hommes de génie sont souvent incompréhensibles (- en tout cas incompris) mais, malheureusement pour mon cas, répété par les milliards de mes semblables, les personnes incompréhensibles ne sont pas forcément des génies. Ce qui, je le reconnais, ne veut pas dire grand-chose. Mais une chaussette sale ne veut pas dire grand-chose non plus et pourtant on peut la retourner elle-aussi. La logique est souvent d’odeur désagréable et de plus, décevante pour l’amour-propre. Demandez à Greta, la petite viking à couettes, autiste Asperger à la logique implacable, ce qu’elle en penserait…