Page du 19 octobre 2019 jour des dieux de pacotilles
A voir la pagaille actuelle, je me disais que Dieu était forcément aux commandes : pour entretenir un désordre pareil en équilibre, il faut un artiste de cirque à la hauteur. Mais manifestement, je me trompais, il est aux abonnés absents ces derniers temps puisque le monde est cul par-dessus tête : la pollution, le dérèglement climatique, les conneries de Trump… Dieu ne nous impose plus qu’un silence assourdissant. Apparemment, nos soucis pourtant d’importance ne sont plus les siens mais, comme ânonnent les nonnes pour le défendre, "le Tout-puissant fait son possible, le pauvre"… (- John, lui, ne dit plus rien mais n’en pense pas moins). Pourtant, à l’impossible Dieu est tenu mais on se rend compte finalement, qu’il est comme tout le monde, qu’il a ses limites. Quand on est dieu, on est en principe tout puissant et éternel mais ce sont des inventions, c’est invérifiable expérimentalement et sans être mauvaise langue, l’attitude de celui qu’on s’est choisi laisse à désirer, les attributs et talents qu’on lui accorde semblent largement surfaits. De toute évidence tous les dieux meurent un jour et le nôtre n’échappera pas au couperet… D’ailleurs, "morts, nous le sommes déjà", se disent-ils entre eux à voix basses dans leur ennui mortel.
A part dans quelques tribus isolées, nous ne savons plus du tout ce que signifie "les dieux". Pour retrouver ce que l’on entend par "les dieux" dans nos contrées (- sous influence monothéiste en trois tiers de longue date qui n’a pas hésité à éliminer brutalement la concurrence), il nous faut faire de l’ethnographie… ou bien aller au cinéma, lire des BD ou jouer à des jeux informatiques : une mythologie nouvelle est en formation. Les dieux égyptiens, grecs, vikings ou de Navarre reviennent en force par la petite porte sur les écrans de nos gamins joueurs. Il n’y a pas de doutes, si les dieux meurent ils sont aussi capables de renaître de leurs cendres sous forme d’applis sur nos portables… balaises les anciens !... Autrefois, dans le doute, nous étions ouverts sur le sujet : à Athènes, par exemple, un temple était voué au culte des dieux inconnus adorés par les étrangers. Si ce n’était pas forcément de la tolérance, c’était au moins de la prudence et de la curiosité (- on ne sait jamais, ces dieux exotiques pouvaient être plus efficaces que nos dieux locaux…). En tout cas, les dieux savaient vivre à l’époque, il leur arrivait un tas d’aventures toutes plus extraordinaires les unes que les autres. C’étaient bien plus passionnant que notre morne barbu assis sur son nuage et qui s’ennuie comme un rat mort en tirant sa flemme. Après avoir inspiré un beau succès de librairie, il n’a plus bougé depuis quelques milliers d’années. D'ailleurs, au bout de six jours, il avait déjà pris sa retraite.
Une chose cependant apparaît de plus en plus claire : ce n'est pas ce Dieu soit disant omnipotent qui nous aidera à régler nos problèmes actuels. Même dans les rangs traditionalistes les plus rigoureux, si on s’accroche encore à d’antiques valeurs en sortant griffes et ongles pour le principe, la foi et les certitudes vacillent avec ce monde chamboulé. Les conditions se sont retournées, de nos jours, c’est nous qui pouvons aider Dieu. On lui doit bien ça se diront nos bigots. Cependant, ce n’est pas forcément ridicule et inutile : ce faisant, selon sa foi, sa naïveté, ou les deux, avec beaucoup de chance, peut-être, éventuellement, il y a une possibilité de s’aider soi-même et c’est hautement improbable mais déjà pas si mal. L’effet placebo n’est pas réservé à l’homéopathie.