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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 25 octobre 2019 jour des livres d'Histoire.

Denis Vallier
Page du 25 octobre 2019 jour des livres d'Histoire.

      Ils étaient beaux et attirants les livres d’Histoire de notre enfance, les illustrations étaient riches et marquantes, un monde en couleur à explorer. On s’y plongeait pour se perdre dans les détails : il n’y avait pas de meilleures bandes dessinées à l’époque. Dans chaque pays, à longueur de pages colorées, chaque nation vantait ainsi ses glorieuses victoires qui sont autant de défaites pour l’ennemi. Si vous traversiez  la Manche par le tunnel pour aller boire une pinte sur Trafalgar Square, vous sortiez du train à Waterloo Station pour bien marquer le coup (- du moins avant 2007)... Mais on ne nous enseignait pas à l’école que nos ancêtres étaient des crapules sanguinaires, jamais vous n’entendiez-dire, tous pays confondus qu’ils étaient les pires esclavagistes, les pires tortionnaires que le monde ait portés. On l’occultait derrière des paravents présentables, on le cachait dans les placards de nos histoires. Nous, on a toujours été les gentils, les méchants, ce sont bien sûr les autres… On ne voulait surtout pas que nos pauvres petits entrent dans ce monde assez peu recommandable par des souterrains malodorants jonchés de cadavres et de squelettes, leurs nuits ne seraient plus que cauchemars. En réalité, ce qu’il conviendrait de dire aux enfants, c’est qu’ils ne sont là à vous écouter que parce qu’ils sont de monstrueux survivants : pour s’assurer une descendance, nos ancêtres ont été les plus violents, les plus cruels, les plus fourbes, les plus lâches, les mieux organisés face à leurs ennemis. Mais j’en conviens volontiers, la douche froide serait un peu trop brutale, cela leur enlèverait toute reconnaissance pour les avoir mis au monde et toute foi en l’humanité. Mais, lucidement, avec de tels antécédents, de telles bases, comment notre espèce peut-elle conserver l’espoir de devenir humaine un jour ? Dans le bouillon de notre douloureuse naissance, que deviennent la morale ? L’éthique ? Quelques piètres mensonges de plus à leur faire ingurgiter ?

      L’humanité sort à peine de sa petite enfance. Avec nos doudous, nos tablettes et nos smartphones, nous ne sommes encore que des primitifs ; la quantité de nos gadgets nous donne l’illusion d’un progrès mais en réalité, notre société n’est encore qu’un minable sac à merde, troué en plus, on ne peut éviter de se salir. Je crois que, même si je m’exprime un peu vertement le consensus sur le sujet est à peu près général, non ?! Ah bon ! Reconnaissez au moins que ça sent mauvais, certes moins qu’au Moyen-Age mais franchement, ça pue encore ! À chacun son point de vue, mais en regard des millions d’années de sélection naturelle (le fort mangeant le faible) qui nous ont donné naissance en nous marquant jusque dans nos gènes, n’est-il pas légitime de se demander si nos valeurs humanitaires (- que nous sommes nombreux à défendre bec et ongles avec foi et conviction) ont encore un avenir ? Même lointain ? Ne seraient-elles pas un mirage de plus ? "Espérer, c’est démentir l’avenir" présageait l’extralucide Cioran, le fossoyeur de service.

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