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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 12 novembre 2019 jour des CRS.

Denis Vallier

      Même les plus aimants et les plus pacifistes de nos parents nous ont légué l’amour et la violence en héritage. Nous en avons été imprégnés avant même de savoir parler, puis on nous les a enseignés à l’école et au catéchisme, eh bien on en use une fois adulte pour préserver nos droits ou en imposer de nouveaux. Il est illusoire de s’imaginer que, même gravés dans le marbre,  qu’ils soient de l’homme ou du citoyen, nos droits soient universels et définitifs. Nos droits, nos devoirs ou nos lois sont toujours relatifs à une époque, un lieu et une culture. Et dans le combat pour les défendre ou les imposer, si l’amour joue parfois un rôle, le dénominateur systématiquement commun restera la violence. Il y aura  la violence légitime de l’État en place qui répondra par exemple à la violence indignée des manifestants portant le masque blanc des Anonymous de Guy Fawkes ou bien des gilets jaunes fluo franchement moches et de mauvais goût.

Page du 12 novembre 2019 jour des CRS.

      Dans son essai "Pour une critique de la violence", Walter Benjamin distingue les deux formes de violence : la violence conservatrice de droits qui vise à préserver l’ordre établi (- qu’incarne clairement une compagnie de CRS en uniforme) et la violence contestatrice qui veut en créer de nouveaux. L’uniformité sombre de l’une se heurte à la diversité colorée de l’autre et généralement prend le pas. Ceux qui sont du bon côté de la matraque feront remarquer que s’ils n’ont pas forcément l’intelligence pour eux, ils ont la formation, l’entraînement, l’organisation, l’expertise, l’endurance. En général ils ont ponctuellement raison parce qu’ils cognent plus fort et plus longtemps. Mais en retour, l’émeute, la révolte, la révolution, peuvent fort bien être organisées méthodiquement lorsqu’elles sont encadrées et soutenues par un mouvement révolutionnaire de fond et le pronostic devient alors beaucoup plus incertain. Systématiquement, comme il y a une arnaque à l’origine de toute religion, du vol à l’origine de toute fortune, on trouve de la violence à l’origine de tout régime politique : ce désordre fondateur fait qu’un Droit nouveau en chasse un autre. Le Droit, ça va, ça vient. De nos jours, la particularité de la guerre entre ces deux forces antagonistes, c’est qu’elle est devenue une guerre des images plus que des matraques et des cocktails Molotov. Le traitement de l’image est devenu crucial vue sa propagation par les médias et les réseaux : il suffit de cadrer sur tel ou tel aspect, de couper telle ou telle scène pour lui faire dire tout et son contraire et chacun y trouve sa vérité. De plus, comme nous sommes saturés d’images de toutes sortes, il faut toujours plus de spectaculaire pour frapper les opinions dans une surenchère sans fin. À l’excès, toute scène devient obscène, toute politique pornographique.

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