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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 17 novembre 2019 jour des lemmings.

Denis Vallier

      Il y a de l’orage dans l’air, nous sentons qu’il se passe quelque chose sans bien comprendre de quoi il s’agit, les problèmes s’accumulent et on n’en voit pas le bout. Pour résoudre la plupart de nos problèmes d’hominidé, si notre intuition présente quelques avantages parce qu’elle saisit des données qui parfois nous échappent, elle a vite ses limites. Quant à l'usage de la pensée qui nous laisse si admiratifs, il ne fait que reformuler les problèmes : la pensée conceptuelle ou discursive n’est guère plus qu’un effet de loupe. La pensée fragmente l’ensemble du réel et s'occupe de résoudre le problème lié au fragment. Mais cette solution locale ne change rien à la problématique globale qui demeure dans le cas présent notre état d'esprit par rapport à notre passage sur terre. Alors qu’est-ce que je fais ? Eh bien je dois donc penser le plus globalement possible même si ça ne m’est pas facile.

      Nous sommes heureux et quelque fois fiers d’être des humains équipés d’un cerveau développé. En fonction de nos savoirs et de nos aptitudes, nous avons de grandes ambitions, de nobles idéaux mais tout est relatif (- et ceci est un absolu). Ce qui signifie qu'un savoir n’est qu’un savoir de quelque chose à un moment donné tout comme une aptitude est appelée à évoluer. Tout autre savoir qui se voudrait absolu, sans référentiel, (- hormis le savoir dont il est démontré par A + B qu’il reste invariant quel que soit le référentiel), est une illusion et la plupart du temps une ânerie. Je n’y échappe pas mais au moins j’en suis conscient, par contre cela ne me dérange pas. Que l’on soit intuitif ou cérébral, tout cela a finalement peu d’importance tant nous sommes plongés dans un monde absurde gouverné par le mensonge. Il nous est devenu progressivement si familier qu’il ne nous choque plus. Mais là n’est toujours pas le problème… Cette pensée sophistiquée ou non, dont nous sommes malgré tout si orgueilleux, ne distingue en rien l'homme de l'animal parce qu’elle n’est qu’un détail. L'animal, tout comme nous, ne poursuit qu'un but : durer suffisamment sur cette planète pour propager son patrimoine génétique. Les hommes ou les femmes ne sont pas comme ils le croient des êtres humains parce qu'ils naissent hommes ou deviennent femmes : l’être humain n’est qu’une illusion, le mirage d’une belle idée qui recule au fur et à mesure qu’on avance, un mythe, une fantasmagorie dont nous faisons tout un plat. L’être humain n’existe pas (- ou alors, je le concède,  pas encore pour les optimistes irréductibles). Nous ne sommes, malgré l'importance qu'a pris pour nous la fonction cérébrale, que des animaux qui comme tous les animaux n'ont qu'un but, qu'un unique objectif : dupliquer son propre patrimoine génétique quelques soient les conditions. Nous parvenons tant bien que mal et plus ou moins bien à nos fins. C’est un objectif qui nous travaille et dont aucune mesure politique, religieuse, économique proposée par un ou des esprits astucieux et autoritaires ne saura nous détourner. Si les choses en restent là, cela provoquera notre perte.

      L’antidote à cette obsession, la riposte à la tyrannie de notre nature (- collectivement suicidaire façon lemmings), est la gratuité et la gratuité, ce très beau mot, est un sous-produit de l'amour véritable. Pour la plus part d’entre nous, nous confondons sans nous en rendre bien compte aimer et avoir besoin. L'amour authentique n'a pas de besoin, il est donc gratuit tandis que l'amour commun, hormonal, instinctif, aussi beau et romantique fut-il à nos yeux, n'est qu'un calcul pour soi. La somme de tous ces amours utiles et attendrissants, de tous ces calculs empilés façon Tetris au profit de nos milliards de petites personnes, aboutit à un monde de plus en plus kafkaïen dirigé par l'égoïsme brutal et le mensonge banalisé et qui se distingue par un abrutissement collectif. Comme me l’a confié Cassandre, une vieille copine, un tel monde est voué arithmétiquement à la dispersion et à la disparition si nous ne changeons pas d’état d’esprit, ce n’est qu’une affaire de grands nombres et de temps.

(Collage apocalyptique de Barry Kite)

(Collage apocalyptique de Barry Kite)

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