Page du 28 août 2020, jour diabolique...
Nous vivons dans un monde devenu obèse où l’énormité le dispute à la vulgarité. Tout est désormais énorme : plus c’est gros, mieux c’est mais le colosse est fragile, un simple virus de pas grand-chose est en passe de le flanquer par terre. Certains s’en sortent mieux que d’autres : la valeur des actions d’Apple a dépassé les 2000 milliards de Dollars, c’est monstrueux… essayez d’écrire 2000 milliards sans oublier un zéro. 2000 milliards, c’est précisément la somme que la crise des subprimes a retiré des poches des petits retraités américains selon le principe des vases communicants… Devant de telles absurdités, j’ai parfois l’impression de me retrouver dans la peau de Bérenger, le seul à ne pas être atteint de "rhinocérite" dans la pièce "Rhinocéros" d’Ionesco. Cette épidémie provoque une apathie coupable et vous fait accepter le pire dans la joie et la bonne humeur… je préfère tourner le dos à ce monde et lui opposer ce que j’ai de plus humain en lui montrant mon cul. À absurdité, absurdité et demie… Inutile de chercher ailleurs le propre de l’Homme, c’est un héritage caractéristique que nous devons à notre passage à la station verticale il y a quelques millions d’années.
Mais de ce côté-là aussi, les Américains sont impressionnants, vous y croisez dans la rue les plus gros derrières du monde. Ils ne manifestent guère d’humanité, cela ne les dérange pas tant qu’ils peuvent s’empiffrer. Même montrer leurs fesses peut leur rapporter de l’argent : tous les hommes d’un certain âge se souviennent encore de cette affiche publicitaire où une jeune noire généreusement pourvue du style Grace Johns faisait péter le champagne qui retombait dans une coupe posée sur ses fesses. Kim Kardashian a repris l’idée et depuis, son postérieur huilé fait le tour de la planète en éclipsant la lune. On ne peut lui en vouloir ni contester ses arguments qui lui assurent gloire et richesse. Ne lui jetons pas la pierre : il y a quelques décennies, Polnareff n’avait pas hésité à montrer ses fesses dans un geste de dérision pour vendre ses disques et la plupart de nos politiques feraient de même pour être élus s’ils le pouvaient mais pour le plus grand nombre, ce serait contreproductif. Pour leur répondre, nous serions nombreux à nous retourner et, moi en premier, à soulever mon kilt pour l’occasion. Je préfère soulever mon kilt que baisser culotte car, manifestement, les fesses sont la partie du corps la plus politique qui soit, la plus visée par les insultes aussi puisqu’on vous invite à longueur d’embouteillage à aller vous faire mettre par la terre entière. C’est la partie de notre anatomie la plus exploitée par les journaux du genre Charlie Hebdo ou Hara Kiri qui n’hésitaient pas à montrer la face cachée du Christ au grand dam des autorités religieuses. D’ailleurs, le Saint-Siège en a longtemps interdit son accès en situant l’enfer très proche du paradis. Pendant des siècles, hérétiques et sodomites étaient associés systématiquement dans le plus grand mépris. Cela ne perturbait pas outre mesure les Jésuites pas plus que d’autres congrégations peu regardantes dans l’intimité… De toute évidence, si, pour autant, ils ne situaient pas l’âme dans leur fondement, ils n’hésitaient pas à donner un visage aux fesses du diable comme on peut le vérifier sur le Retable des Dominicains dans un musée de Colmar et sur bien d’autres tableaux de l’époque. Mal leur en prit car, depuis, ces maudites fesses ont pris de l’esprit même si elles continuent à sentir, entre autres, le souffre.