Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 9 janvier 2021 jour de divine liberté...

Denis Vallier
Page du 9 janvier 2021 jour de divine liberté...

On a beau le placer au plus haut des cieux et lui reconnaître une intelligence pratique prodigieuse, Dieu n’a pas plus de conscience et d’imagination qu’une amibe. Et c’est heureux pour lui car la solitude l’aurait rendu fou depuis une éternité. En tout cas, il n’a manifestement aucune malice mais c’est peut-être parce qu’on le met au masculin et qu’on l’a enfermé dans des lieux de culte…  Nous lui attribuons cruellement une conscience immanente et nous considérons qu’il nous a fait à son image pour ne plus être seul et bien sûr, à ce moment-là, on peut le comprendre : imaginez ce que peut représenter toute l’éternité dans une absolue solitude… une agonie sans fin à l’isolement, au cachot… Comme l’éternité est ennuyeuse lorsque le temps s’englue à la traverser !… Et si l’éternité n’était qu’une torture interminable ? On ne peut s’ennuyer que dans le temps et le temps est lié aux choses qui vieillissent. Hors du temps et accroché à la volupté d’être, il pourrait peut-être s’en sortir mais se serait sans la matière, sans autrui, sans mots, sans tabernacles, en un mot il ne serait rien que le verbe d’une pureté transparente à elle-même. Pour l’instant, il est tout aussi bien rien que tout, mais là il serait vraiment tout.

L’espace où on le place lui est forcément une prison et le temps que nous lui accordons, une torture : la seule chance qu’il peut se donner est de s’en échapper. À cette condition, il perdrait tout support et supporteur mais serait libre. A nos yeux, il demeurera pour toujours la nécessité que nous connaissons mais qu’aurait-il à regretter de nous échapper ? Un parfum de rose, le soir, sous la tonnelle ? Un ciel violacé à la tombée du jour ? Un sein dressé ? Une fraise juteuse ? L’œil doré d’un chat ?… Des détails… même si seuls les détails sont beaux dans l’univers, car l’ensemble est pathétique, froid et frise le ridicule au bout de nos lorgnettes. Ce sera bien sûr un sacrifice, mais il lui faudra avant tout se passer du temps qui passe, qui ne passe pas, qui en passant le heurte, le frappe, le traumatise. Le temps appartient aux choses : en supprimant les choses, il supprimerait le temps et effacerait toutes ses limites. Fini l’espace, fini le temps ! Plus de matière ! Seule une lumière à jamais invisible… illimitée… "irrelative"… immobile… absolue, enfin… La substance lisse, épurée, éternellement mortelle… Vite une pancarte pour monter à l’assaut de tous les temples :

« LIBERONS DIEU ! »

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commentaires