Page du 8 avril 2021 jour de l'apprenti gourou...
Vous avez de l’ambition, une soif de pouvoir et d’argent que votre pauvre carnet d’adresse vous interdit d'étancher, vous êtes imaginatif, audacieux, narcissique, pervers, affabulateur, manipulateur, sans scrupule et prêt à tout, même au pire… eh bien qu’attendez-vous ? Lancez-vous ! Commencer par créer une secte et si vous savez y faire, vous deviendrez le pape d’une nouvelle religion… la demande est forte et les gogos sont là à vous attendre la bouche ouverte. L’opération n’est pas de tout repos mais bien plus rentable que le trafic de drogue, vous serez récompensé au centuple.
Malgré mes sarcasmes répétés, je suis bien obligé d’admettre que Religion et Théologie demandent un certain savoir-faire quasi scientifique dans le sens où il faut une bonne dose d'organisation et de méthode pour structurer tout le fatras né des jachères de nos esprits. En un sens donc, le théologien bat remarquablement la démesure. Il faut aussi accorder persévérance et mérite à tous les religieux : il n’est jamais facile d’imposer l’invraisemblable à des esprits sains ou à plus intelligent que soi. Tout cela ne peut se faire sans quelques bûchers, raccourcissements de cols, lapidations, écartèlements chevalins et autres goudrons et plumes, c’est très salissant… D’un autre côté, que voulez-vous… si l’on ose s’opposer à des vérités révélées, il faut bien accepter de vivre dangereusement. Si l’on avait clairement entendu Galilée marmonner "E pur si muove !", il aurait perdu toutes ses dents... Et la vie du savant, du chercheur, d’un Giordano Bruno, d’un Evariste Gallois, barbotant jusqu’au cou dans l'ignorance crasse de leurs contemporains, ou celle de l’alchimiste ou du guérisseur ferraillant courageusement avec les non-réalités, les para-, infra- ou extra-réalités… voilà bien une bonne définition du mot danger, non ?
Si vous êtes apprenti gourou, voici en gros le mode d’emploi à respecter pour fonder une nouvelle religion… Il vous suffira de respecter le schéma directeur suivant : non seulement vous devrez vous échiner pour imposer des histoires à dormir debout comme étant d’authentiques faits avérés, mais il est encore plus important de convaincre sa clientèle de sa misère morale et vous n’y parviendrez pas sans quelques baffes. "Crains, malheureux, et défie-toi de ton espérance même."(Louis Bourdaloue)… "La vraie pénitence est ferme et constante: pourtant, elle nous fait, non pas pour un jour ou une semaine, mais sans fin et sans cesse, batailler contre le mal qui est en nous."(Jean Calvin)… L'enfer ne brûle que sous les pieds des croyants mais il faut les en convaincre… Vous devrez affirmer vigoureusement qu’en l’absence de la divinité que vous représentez, notre espèce passe sous la coupe du Diable et se tourne naturellement vers le mal et le péché, que même le plus sain des saints porte en lui le germe de la violence, qu’il a le potentiel pour commettre les actes les plus abominables, que livré à lui-même, ce n’est qu’affaire de conjoncture s’il y échappe, et qu’en plus, chacun d’entre nous est tenu de sauver son âme sous peine des flammes éternelles de l’enfer. Et ce dernier point sera la clé de voûte de votre édifice.
Comme l’obligation de salut n’existait pas avant la première religion car personne n’en avait eu l’idée, il a bien fallu l’inventer mais de nos jours, elle s’avère un peu plus difficile à faire passer car, malgré les extraordinaires perfectionnements des scanners, IRM et autres Pet-scans, on est toujours en train de chercher où peut bien se cacher notre "âme" dont tout le monde parle. C’est comme si elle s’était volatilisée… Supprimez la notion d’âme et vous coupez l’herbe sous les pieds de tous les religieux, vous leur enlevez le pain de la bouche. Mais qu’importe ! "Hors de l'Église, point de salut" ! à ce qu’en disait Saint Cyprien… Et la politesse alors ? Si c’est comme ça, j’obéirai pour une fois : Pape, prêtre ou apprenti gourou, je n’enlèverai plus jamais mon chapeau devant personne…