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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 9 avril 2021 jour de la pomme...

Denis Vallier

Dès que vous soulevez une contradiction flagrante, tous ces braves gens qui vous enseignent le catéchisme quand vous êtes gamin sont capables de vous balancer dans les gencives "j’ai raison" avant d’user de l’arme suprême en dernier recours : "De toute façon, c’est un Mystère !". Ils doivent se dire qu’ils ont une bonne raison de dire ça, mais on la cherche ensemble… Leurs raisons d’avoir raison sont un mystère aussi mystérieux que tout ce qu’ils veulent nous faire gober. Avec eux, c’est tout ou rien, ils nous demandent de tout avaler d’un bloc, un verre d’eau et ça passera. Ils nous donnent ce qu’ils n’ont pas mais ne voient aucune contradiction à nous faire psalmodier "Pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensé". Depuis, je leur ai pardonné parce que c’étaient de brave gens, d’autant plus qu’ils s’abritaient derrière le grand chef, celui qui a chassé impitoyablement Adam et Ève du Paradis pour une stupide histoire de pomme et nous a collé un péché originel à la naissance comme une marque au fer rouge... Comme si naître était un crime… Et ça par contre, je ne m’en suis jamais remis, c’est impardonnable ! Tout ça pour une pomme, franchement… Dieu n’a rien trouvé de mieux à faire ?

On ne peut pas accuser sans preuve, alors, pour en avoir le cœur net avec cette histoire de pomme, j’ai mené mon enquête au Jardin d’Eden. - Police ! Vos papiers ! C'est juste pour jeter un coup d'œil… Il m’a rappelé le Jardin de la Croix où mon grand-père entretenait quelques pommiers. Ses pommes étaient goûteuse à souhait cueillies sur l’arbre, je les entends encore claquer quand mes quenottes mordaient dedans pour en arracher un morceau… Et comme je m’en doutais, figurez-vous que la pomme a un bon alibi : on peut tourner la Genèse dans tous les sens, nulle part n’est précisé qu'Adam et Ève ont croqué dans une pomme. Et pourtant, un scribouillard mal intentionné en a fait injustement le symbole du péché originel. La Genèse 3-3 évoque simplement le "fruit de l'arbre qui est au milieu du jardin", ce n’est pas la même chose.

Après enquête, la confusion sur la pomme est due à une erreur d’Aquila de Sinope quand il traduisit en grec le texte hébreu de la Bible au 2ème siècle. L’arbre vaguement fruitier de la connaissance est devenu d’un seul coup un pommier. De toute évidence il y avait vu une allusion au fruit défendu. Mais le plus probable, c’est qu’il s’agisse d'une figue bien plus fréquente autour de la Méditerranée (- de plus, Adam et Ève se vêtirent comme ils purent avec les feuilles d'un figuier).  St Jérôme, dans sa traduction en latin de l'Ancien Testament, interpréta également ce passage de manière identique, même si "pomum" en latin signifie fruit et non pomme. Malgré tout, on continue à vouloir nous persuader que le fruit défendu est la pomme de mon grand-père quand tout le monde sait bien que c’est tout autre chose.

Bon, ça, c’est fait… trêve de chicaneries et d’exégèse pour un détail sans importance... Comme autre version, j’aime autant cette chanson commise par Sulbac, un chansonnier parisien rigolard des années 1900 :

Quand le bon Dieu créa le monde
Dans le paradis il plaça
Une saucisse grasse et ronde
Qu'après un arbre il accrocha
Puis il défendit à la femme
De toucher à ce fruit suspendu
Mais le serpent reptile infâme
Près d'Ève siffla c't'air connu…

(Dessin de Serre)

(Dessin de Serre)

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