Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 25 février 2022, jour de grasse consolation....

Denis Vallier
Page du 25 février 2022, jour de grasse consolation....

On sait jouer aux échecs en Russie, mais Poutine, c’est toute la rangée du fond et il joue pour de vrai. Ce nostalgique de l’Empire a ouvert la boîte de Pandore et joue surtout à l’apprenti sorcier. Même pour Poutine, le fil du rasoir est bien étroit… à cheval dessus, c’est plutôt gênant.  On voit sa vie menacée d’être coupée en deux versants également périlleux : d'un côté par les bouches avides de la gourmandise, de l'autre par l'amertume de l'avarice qui se nourrit d'elle-même et gaspille sa pingrerie. Il arrive fréquemment que des boulimiques avares se convertissent à l’anorexie… j’en ai connus de tristes comme Poutine et ne voudrais pas leur ressembler. Et pourtant…

Poutine n’a jamais demandé le pouvoir qui rend fou : il lui est tombé dessus après une erreur de casting des apparatchiks de l’époque croyant hisser sur le trône une marionnette du KGB. Ils se sont retrouvés dans sa poche en un tour de main : à eux l’argent du gaz, des trafics et du crime organisé, à lui le pouvoir et la bombe. Mais même quand on est un ascète rationaliste, froid et méthodique, la gourmandise du pouvoir absolu et sa violence vous tentent. N’allez pas dire à ceux qui meurent de faim que la maltraitance animale est une horreur criminelle même si elle mérite pourtant qu’on s’y attaque… en même temps, le caviar ou le foie gras, c’est si bon… Quel autre crime sordide de penser à sa santé et à ses bourrelets quand on est face à face avec une poule au pot cuite dans un bouillon de légumes où, pour mettre du goût, on a longuement fait cuire des carcasses de canards, un foie de canard que l'on a retiré mi-cuit et que l'on servira en entrée, (- à défaut de le faire au bain-marie avec du fenouil et des truffes), accompagné d’une salade aux noix et au roquefort... Que l’on soit du Sud-Ouest ou de Russie, vivre a toujours été criminel…

Nous aussi on a notre poutine, elle est niçoise et ce plat d’alevins est délicieux. Nous sommes tous des petits Poutine en puissance, mais malgré tous ces crimes inévitables, je refuse d’avoir à choisir entre l'orgie et l'ascèse, entre l’appétit et le dégoût. Pourtant, mieux vaut manger les pissenlits par leurs feuilles que par leurs racines. Même si je dois pour cela subir le supplice du gril de mes désirs, je veux moi aussi en satisfaire plus d’un. Le long fleuve si peu tranquille de la vie est bien trop court, il n’est qu’enfilade lorsque le fil devient ardu ou, carrément, torride lorsqu’il s’insère ! Il ne me suffit pas de savoir que tout est excusable ou presque puisque nous ne sommes pas libres de tous nos actes car il y a bien sûr des actes que je rejette violemment comme la guerre sans trop savoir pourquoi… ils vont sans doute à mon encontre. Tout comme Poutine et le fleuve, ce que je cherche, ce n'est pas une excuse à ma vie, mais exactement le contraire d'une excuse : c’est le pardon pour mes débordements (- car, fatalement, je déborderai) et la consolation pour les peines que cela causera aux autres autant qu’à moi. Mais c’est une fausse consolation qui nous crie aux oreilles "espère, car chaque nuit n'est qu'une trêve entre deux jours". Espoir si ténu dans le jour qui s'estompe doucement… la frayeur originelle où les nuits étaient sans feu resurgit insidieusement. Alors, dans le silence obscur entre deux explosions, vacille ce qui nous sert encore d’âme, amochée, pillée, pilonnée, qui, tant de fois humiliée, rencontre enfin dans la béance du vide, la fin de ses meurtrissures. Béance… Ah ! Que la violence est quotidienne quand ne rougeoient plus que les tisons dans l’âtre…

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commentaires