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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 16 mars 5055, jour en longue marche...

Denis Vallier
Page du 16 mars 5055, jour en longue marche...

La Chine est un pays colossal de 1,4 milliard d’habitants qui a inventé la poudre, la boussole et un tas d’autres choses très utiles comme l’administration et la Covid 19. À un cheveu près, une personne sur cinq qui marche sur cette planète est chinoise… c’est considérable pour un seul pays et cela demande un sens stratégique de joueur de go pour faire marcher du même pas un tel attelage… Ce milliard quatre de Chinois forme un peuple ingénieux, astucieux qui se lève de bonne heure pour aller bosser et mange tout ce qui est comestible en chemin… ils sont assez peu délicats et précautionneux, adaptés depuis toujours à des régimes politiques tyranniques et se montrent fatalistes face à l’injustice ou aux coups du sort.

Aux yeux bridés des Chinois, il faut avant tout, pour bâtir un monde harmonieux, des connaissances pratiques, beaucoup de travail et une vision binaire respectant les vieux préceptes de la sagesse antique concentrée par le principe du yin et du yang, l’ombre et la lumière, le froid et le chaud, le négatif et le positif, le féminin et le masculin, fruit de millénaires d’observation qui feront hurler nos féministes ennemies du genre. Selon cette expérience ancestrale, il vaut mieux valoriser le tour de main et l’habileté que la théorie et l’intelligence pure : à leurs yeux, la théorie a assez peu d'importance, très peu d’influence et peut même se montrer nuisible quand elle aboutit à des armes de destruction massive. Ils ne s’investissent dans la recherche fondamentale que lorsqu’ils ne peuvent pas faire autrement… mais ne vous en faites pas pour eux, ils ont les yeux vifs et curieux. Leurs millions de grosses têtes ne se gêneront pas pour nous piquer nos dernières trouvailles afin d’accélérer leurs travaux sur la fusion nucléaire ou le moteur à hydrogène afin d’anticiper la pénurie d’énergie fossile. Pragmatisme et loi du plus gros obligent…

De notre côté, nous concevons ordinairement que théorie et pratique doivent avancer de concert pour pousser le progrès devant elles, et que si l'une venait à manquer, le chariot irait de traviole. À mieux y regarder, c'est peut-être une idée de l'ordre de la croyance (- la dangereuse foi en la Science qui fera le malheur du Docteur Folamour), puisqu'on peut imaginer qu'on invente des choses utiles sans autres secours qu'un peu de chance et beaucoup d'expériences.

Il n’est pas totalement idiot d’expliquer notre différence à ce sujet par l'idée qu’une loi scientifique absolue et abstraite à laquelle nous croyons, ne serait qu’une dérivation de la loi divine. Comme les Chinois n'ont pas connu de monothéisme et son Dieu unique et jaloux, ils n’auraient pas imaginé qu'il puisse exister de telles lois intangibles, ou, du moins, seraient peu curieux de les découvrir de nos jours contrairement à ce que nous encourage notre formatage. D'ailleurs, sans même discuter de l'existence ou non de telles lois, on peut remarquer que le "syncrétisme pragmatique" des Chinois aura au moins eu le mérite d'éviter les guerres de religion, du moins jusqu’ici, avant qu’ils ne décident de mettre les Ouïghours au pas… Mais la Chine est en train d’évoluer si rapidement tout azimut que l’on devient incapables de déterminer où elle va, même dans ce domaine sensible.

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