Page du 31 mars 2022 jour pensif...
Enfant, nous débarquons dans ce monde colossal et prodigieux et nous essayons de comprendre où nous sommes tombés avec, derrière la tête, l’idée d’y creuser notre petit trou pour y vivre le plus heureux possible. Penseur un jour, penseur toujours… Au fur et à mesure que nous avançons d’évidence en évidence, l’horizon recule et les illusions s’accumulent… mais elles sont bien moins nombreuses que nos désillusions… Si la prudence s’impose donc par rapport à ce que nous percevons de la réalité, il ne s'agit pas non plus de considérer l'existence comme purement illusoire et sur de tels jugements renoncer au monde et à ses joies et encore moins, se créer des dieux. Les spéculations mentales ont leurs limites et je les vois inopérantes hors de notre domaine de "relativité" : j'irais même jusqu'à dire, douteuses et ce, en regard de notre propension à l'identification. Nous avons tendance à tout ramener à nous et à ne voir que ce que nous voulons voir, même quand on s’appelle Raoult.
C’est qu’en sous-main travaillent nos peurs… peur de la faim et du froid, peur de la nuit et du méchant loup, peur de la solitude et de la maladie, peur de la mort et de la souffrance… Nos quêtes incessantes ne seraient-elles pas essentiellement le reflet de craintes fondamentales qu'elles permettent d'occulter par le jeu de non moins incessantes spéculations ? Elles nous occupent l’esprit et nous empêchent de penser à autre chose… Mais au résultat, nous ne faisons que déplacer naïvement le sens d'un niveau sur un niveau différent comme dans un jeu de cubes pour bébés. Dans ces conditions, il faut une sorte de foi pour supposer qu'il existe une vraie "signification" quelque part à ce que l’on vit et à ce que l’on voit, et non pas se contenter d’un simple jeu de maniement de symboles. Mais cette foi qui anime aussi bien les scientifiques que les philosophes, personne n'est obligé de l'avoir pour avancer, et dans la pratique du quotidien ceux qui en sont animés ne se débrouillent guère mieux dans l'affaire que ceux qui ne l'ont pas. Finalement, les sages et les penseurs sont des croyants très ordinaires et c’est une désillusion de plus.