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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 3 mai 2022 jour un peu trop intelligent...

Denis Vallier

Les Américains avaient quasiment exterminé les loups et depuis leur réintroduction dans l’immense réserve de Yellowstone, on a pu en mesurer l’importance dans l’écosystème : ils ont diminué la prédation des coyotes amateurs de nourrissons de toute espèce et limité l’impact des herbivores sur les jeunes pousses d’arbres, et du coup, la faune et la flore prospèrent à nouveau. Depuis toujours, la nature maintient un équilibre fin jusque dans le moindre de ses détails et puis nous avons débarqué avec nos gros sabots… Nous sommes la pire bourde de la planète en 45 millions de millénaires mais en principe, la nature finit toujours par réparer ses erreurs.  Nous autres prédateurs suprêmes sommes décidément de curieux animaux bien décidés à lui contester cette faculté d’autorégulation… la nature n’avait pas besoin de tant d’intelligence, son erreur a été de nous doter d’un cerveau disproportionné.

Le hic, c’est que si notre cerveau est globalement performant en le comparant à celui des autres bestioles, il a bien du mal à se comprendre lui-même malgré les progrès magistraux des neurosciences. Tout ce dont nous sommes sûrs c’est que nous avons progressivement migré des arbres vers l’asphalte et le béton en en gardant la nostalgie… Nous avons évolué tout d’abord très, très lentement puis de plus en plus vite jusqu’à l’accélération brutale de ces dernières décennies en rapport sans doute avec notre démographie galopante. Nous sommes sortis des grottes mais on ne sait plus trop où l’on habite car ce grand chamboulement fait de nous un mélange hétéroclite et jamais vu. Nous avons plus ou moins conscience de ces bouleversements et nous faisons ce que nous pouvons pour nous adapter,

La conscience de soi, de par sa mise en abyme et la volonté de volonté qui la caractérise entretient la continuité de l'être qu'elle cherche désespérément à modifier, précisément parce qu'elle ne peut ni lui coïncider car elle est toujours en mouvement, ni lui échapper mais en être seulement l'expression comme l’ivresse est l’expression du raisin… L’identité de chacun de nous a la consistance et la vérité fugitive de son mouvement. Si tout est changement et change tout le temps, alors le changement et même l’accélération, deviennent des constantes. Ainsi alcoolisés, on se trouve dans l’impossibilité d’assigner des repères d’identité incontestables aussi bien à un territoire qu’à une culture, à une personne qu’à une langue et, pour finir, à quelque chose comme un sens. En tout cas, pas plus qu’à la position d’une particule… j’ai beau prendre tout cela à la légère, tout cela ne procède pas de fantaisies et de spéculations mais exige des raisonnements solides hors de ma portée. Mais finalement,  à quoi bon avoir conscience de nos ombres et savoir qu'elles ne sont que le reflet de la Réalité si, malgré tous nos soi-disant progrès, nous végétons encore à l'intérieur de la Caverne de Platon sans même faire un pas pour en sortir ?

Page du 3 mai 2022 jour un peu trop intelligent...
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