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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 8 octobre 2018, jour dans un nid de coucou...

Denis Vallier
(Photo extraite du film "Vol au-dessus d'un nid de coucou" de Milos Forman – 1975)

(Photo extraite du film "Vol au-dessus d'un nid de coucou" de Milos Forman – 1975)

Je m’appelle Jack Nicholson, vous me connaissez sans doute : je suis célèbre, j’étais l’acteur principal dans "Vol au-dessus d’un nid de coucou" en 1975, le chef-d’œuvre de Milos Forman. Un rôle formidable… Mais hier, je ne sais pas ce qui m’a pris : j’étais persuadé d’être Napoléon exilé sur son île au milieu de nulle part et, face aux flots infinis, aux sanctions de l’Histoire et aux réalités implacables, je pleurais… Nos peines sont toujours relatives et nos larmes peuvent même être égoïstes, voire ridiculement salées mais comme elles font partie de nous et qu’on les ravale, elles sont toujours émouvantes. Même si ce sont celles d’un autre…

Mais qu’importe… aujourd’hui est un autre jour, je suis redevenu moi-même et pourtant, rien n’a changé : je suis toujours révolté par le tableau pitoyable de mes compagnons de galère, j’en suis révolté et prêt à tout faire péter, à éclater la tête de nos tortionnaires les plus sadiques. Mes pauvres camarades sont maintenus par une camisole chimique dans une ignorance crasse encouragée par les empires financiers, les énormes consortiums et les gouvernements. Vous ne voyez sans doute guère de cohérence dans mes propos mais j’en suis venu à me dire que la pire des prisons sur terre est manifestement notre cerveau et que, en face des puissances d’argent qui prennent l’humanité en otage, nos sentiments sont la grande faiblesse de notre espèce…

Je vous rassure tout de suite, je ne suis pas fou, pas fou du tout : bien au contraire, tout baigne dans le meilleur des mondes d’Huxley. Bien entendu, il me faut ma part de rêves éveillés, mon quota de merveilleux, ma dose quotidienne de poésie et pourtant, mon cerveau semble fonctionner tout ce qu’il y a de plus normalement… quoi que… J’ai parfois quand même quelques doutes : dans cette vie complètement dingue où un sort malheureux m’a jeté, si tout le monde a un problème sauf moi, il se peut que ce soit moi le problème et je ne pourrai indéfiniment m’en tirer à bon compte… D’ailleurs, j’ai remarqué que si je réponds au directeur de l’asile que je vais bien quand il me dit "comment ça va ?", il me prend pour un fou et quand je lui dis que je suis fou pour lui faire plaisir, ce grand malade augmente mes doses… Mais au final, qui est l’animal ? Le chien dans la cage ou celui qui l’y enferme ? Vous pouvez me jeter un os et vous moquer tant que vous voulez… rira bien qui rira le dernier !  Je sais bien ce que vous allez me dire : que mon pays est formidable, que je n’ai qu’à aller voir ailleurs les vraies misères du monde, que je me comporte comme un enfant pourri-gâté à qui on ôte la sucette de la bouche, que je vis en sécurité garantie par l’Etat, etc. etc… Pourtant regardez-vous… vous me jetez votre mépris par poignées de sable mais le vent vous les retourne en fouettant vos visages, en crevant jusqu’au cœur votre œil de Caïn et dites-vous bien que si vous croyez être encore de ce monde dans vos cages dorées, c’est bien la preuve que seuls les paranoïaques survivent…

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