Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du vendredi 13 octobre, jour différent des autres...

Denis Vallier
Page du vendredi 13 octobre, jour différent des autres...

Je me suis levé très tôt ce matin pour écrire un livre de la main gauche mais elle est si maladroite… J’y ai mis tout mon cœur, mes rires et mes larmes même si j’écris bien trop vite, à gros traits dont l’épaisseur, vous voyez bien,  dépend de ma finesse d’esprit. Tout comme l’horreur est humaine et que certains sont plus humains que d’autres, nous sommes tous différents mais j’en connais qui le sont bien plus que les autres… eh bien ce livre, je l’ai écrit pour tous ceux qui ne sont pas comme tout le monde et qui n’ont rien demandé, les mal dans leur peau, ceux qui ont un pet-au-casque, les tordus, les fêlés qui laissent entrer toute la lumière du soleil, ceux qui aiment trop, n’importe qui, n’importe comment et de travers, les écartelés qui se sentent si seuls… Je me suis dit, quitte à être seuls, autant qu’ils le soient à plusieurs… Je sais bien… écrire un livre ça sert à quoi ? Qui va encore lire un livre de nos jours sinon quelques fossiles ? En plus, je l’ai relu et il laissait vraiment à désirer… d’ailleurs, j’ai arraché sa dernière page… elle m’a mis en rage, je l’ai mise en cage.

J’ai écrit une histoire d’amour pour vous autres les sensibles parce que vous aimez les histoires d’amour mais pas moyen de la terminer gentiment, la fin est nulle, nulle à… à pleurer. Elle commence pourtant plutôt bien par "De la main gauche"… une très belle chanson oubliée de Danielle Messia qui plait aux femmes qui aiment les femmes… Mon livre parlait d’un drôle d’oiseau dont je ne retrouvais plus le nom, un oiseau de passage mi-graineux, mi-gratteur, envolé vers d’autres cieux. J’ai abandonné l’ouvrage mutilé sur la table… et j’ai aperçu la dernière page qui s’enfuyait au loin, fraîche et vive dans le ciel, tout là-bas de plus en plus loin, une plume emportée par le vent.  Dommage, je n’en reverrai jamais la fin… Où s’en vont tous les mots partis en fumée ?…

Je le sais, je n’écrirai jamais de livre jusqu’au bout… j’en suis bien incapable. Ainsi va la vie, belle et tragique comme les histoires d’amour ou les parties de tennis : on joue, on transpire, on prend plaisir, on en bave, et il est toujours aussi difficile de terminer la partie… Je ne vais pas gémir parce que mon histoire se termine en queue de poisson, mais je vais au contraire en sourire parce qu’au moins, ces mots d’amour auront existé. Je me réjouirais même encore plus si toutes ces feuilles éparpillées au vent terminaient leur course dans des toilettes au bout du monde, elles y trouveraient ainsi une utilité pour la main gauche et, enfin, une fin cocasse : elles seraient lues d’un derrière distrait…

 (Pour les curieux, je joins un lien vers la chanson de Danielle Messia, oiseau de passage si vite envolé)

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commentaires