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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 8 janvier 2023, jour censuré...

Denis Vallier
(Dessin de Mykaïa)

(Dessin de Mykaïa)

Je déteste les caméras de surveillance, les micros, j’ai horreur que l’on espionne mes faits et gestes, d’être sous le regard et la coupe d’un maître, je hais la censure depuis toujours… Elle eut ses périodes fastes et dans mes souvenirs, 1857 fut un bon cru puisqu’après Madame Bovary on passa aussi les Fleurs du mal à la moulinette, mais c’est du pipi d’oiseau à côté de ce qui nous attend. Déjà en 1784 après six ans de censure, Beaumarchais (- toujours impertinent et satirique) faisait dire, au héros du drolatique Mariage de Figaro: "Pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l'autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l'Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l'inspection de deux ou trois censeurs." Bien sûr, ça se passait il y a fort longtemps et tout là-bas, ailleurs, à Madrid dans une histoire presqu’aussi exotique que "les Voyages de Gulliver"…

La vérité surtout quand elle est historique pose indéniablement problème sur le moment à tout pouvoir. Il suffit pour s’en rendre compte de plonger dans le brouillard des guerres actuelles… Un pouvoir en place quel qu’il soit serait bien fou d’ouvrir ses placards devant n’importe qui, car il n’y survivrait pas. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce qu’il surveille l’information sous toutes ses formes, mais cela se propage, se diffuse, s’insinue et va bien trop loin, en entrant bien profond dans nos vies jusque dans leurs moindres détails. Les moyens actuels rendent la tâche bien plus aisée que du temps de Malraux et pourtant, pour lui rendre hommage par un timbre en son honneur, la Poste avait bricolé une célèbre photo de lui cigarette au bec en lui enlevant sa cigarette pour respecter la Loi Evin. La pipe de Tati ou les cigarettes de Sartre ou de Chirac ont, elles-aussi, été caviardées. Même Lucky Luke a perdu son mégot ! Ce n’est pas bien méchant, une simple écorchure me direz-vous, ce ne sont effectivement que des détails sans grande importance, mais où est la limite ?

Ça commence gentiment par une cigarette que l’on efface d’un timbre, puis on efface sur les photos officielles, les membres du parti communistes exécutés d’une balle dans la nuque par les sbires de Staline. De nos jours, une IA vous efface n’importe quoi ou n’importe qui en une fraction de seconde ou bien, après la capture de quelques secondes de vidéo, elle peut faire dire n’importe quoi à n’importe qui et vous n’y voyez que du feu… Si les paroles et les images ne sont plus fiables, si on ne peut plus faire confiance à quoi que ce soit, toutes les informations se valent, les pires comme les vertueuses, les mensonges de Trump comme les dires d’un Malraux. Pourquoi devrions-nous encore croire à la moindre vérité et quelle morale ou éthique pourrait nous demander de nous y tenir ? Nous sommes entrés dans l’ère post-trumpienne du mensonge systématique, permanent, revendiqué et sans aucune honte… C’est aussi ça le progrès.

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