Page du 27 mai 2021 jour dogmatique...

Ce qu’il y a de maladif dans le religieux, ce n’est pas tant le fanatisme délirant de certains accros que l’énormité de la construction dogmatique reposant sur un vide absolu. On mesure particulièrement de nos jours combien rien ne stimule plus les théories délirantes que l'absence de preuves. Dans les religions chrétiennes, il faut particulièrement de bonne volonté pour admettre que Dieu et Dieu font trois ou qu’il n’y a jamais Dieu sans trois : la volonté normale vous en empêche. Dans les plis de l'improbable, il est aisé de semer… Ce dont l'homme est incapable, l'idole le prend en charge, s'en occupe, et on s'en remet à elle. Le paradoxe (- ridicule et qui m’amuse) c’est qu’une idole comme un fétiche provient toujours des mains de l’homme. On commence en général par croire à un ou des dieux, puis on finit par croire à la structure élaborée. Se forme une carapace de rites, de prières, d'interdits, un corpus de textes abscons. Quelques pauvres gens tombent dans le panneau, une caste de prêtres avides et médiocres se développe et parmi eux le prêtre médiocre est visqueux qui met ses mains dans votre culotte... Et ces murailles parviennent, à force, à étouffer l’idée du Dieu ainsi que les croyants, qui finissent par avoir plus peur de la structure que du Dieu... C’est valable pour toutes les religions.

En février 1526, le poète Clément Marot, pourtant célèbre et protégé, fut emprisonné à la prison de Châtelet pour avoir mangé du lard durant Carême… Il s’en est remis, mais le 28 février 1766, le chevalier de La Barre a été condamné à avoir la langue tranchée, à être décapité et brûlé par les juges du présidial d’Abbeville pour ne pas avoir ôté son chapeau ni s’être agenouillé au passage d’une procession, pour avoir chanté des chansons de corps de garde et pour détenir le Dictionnaire philosophique de Voltaire… Les dogmes, intangibles et ascientifiques sont des imbécillités furieuses qui mènent à de telles inepties. Bien sûr, existent des domaines  où l’on est bien obligé de croire sans certitude et c’est le cas de l’amitié : pour être l’ami de quelqu’un, il faut croire en lui, croire qu’il est digne de notre confiance et passer par cet acte de foi, mais pour le reste, comment croire aveuglément en l’absurdité ? Bien sûr, la vie est faite d’incertitudes, d’un rapport permanent avec l’inconnu mais il demeure absurde de croire en quoi que ce soit à partir de données insuffisantes ou fausses. Les pires tragédies de l’histoire de l’humanité qui ont fait des millions de morts comme les croisades ont été associées systématiquement à des phénomènes mystérieux : pluie de météorites, comètes, sécheresses prolongées ou au contraire inondations violentes et cela ne doit rien au hasard mais aux intérêts de quelques-uns. Ainsi, quel sens possèderait encore la foi en un Christ si on connaissait sa véritable nature et sa véritable histoire ? Dans le cas du Christianisme, il faut aimer passionnément et sans raison… admettons toutefois que c’est tant mieux si cela aide de pauvres gens à affronter les difficultés de la vie et à les rendre meilleurs.

Revenir sur des faits passés si anciens ne servirait qu’à entretenir une rancune si cela ne permettait avant tout de relativiser notre parcours. En nous retournant vers notre passé, nous pouvons mesurer le chemin effectué et nous réjouir de notre évolution, mais nous ne sommes jamais à l’abri d’une régression : une jeune religieuse vint de se faire exclure de sa communauté par ce qui ressemble fortement à un procès en sorcellerie… Cela permet aussi de comparer notre situation à celle d’autres lieux où, par exemple, l’Islam exerce encore une forte pression judiciaire sur des centaines de millions de Musulmans avec ce genre de sanctions qui reste d’actualité. Le refus nostalgique de toute évolution ressemble à s’y méprendre à une forme de régression par rapport au mouvement du monde. Pendant combien de temps et jusqu’à quel point peut-on réussir à vivre dans le passé ?