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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 6 mai 2019 jour sans fin

Denis Vallier

      Tu débarques dans ce monde tout nu et tout mignon et quand tu parviens à demander où tu es on te répond : « Tu es dans l’univers »  et si tu as la folie de demander d’où il vient cet univers on t’assène « Dieu l’a créé. Il est là et puis c’est tout ». On peut s’imaginer tout ce qu’on veut, mais l’univers est bel et bien là effectivement, perceptible, mesurable. Il est fort possible qu’il ne soit pas tel qu’il nous paraît et même, il n’est pas impossible que de multiples univers viennent s’y entremêler en douce sans que l’on s’en aperçoive (- ce qui expliquerait pas mal de phénomènes énigmatiques) mais de toute façon, un univers quel qu’il soit ne peut être né spontanément. « Spontané » : « Qui se fait de soi-même, sans avoir été provoqué, qui se produit sans cause apparente ». Un minimum de réflexion rudimentaire nous laisse entendre que « sans cause apparente » ne signifie pas qu’il n’y en a pas. Pour le bon sens intuitif quelque chose de spontané est quelque chose qui apparaît brusquement, « comme si » c’était sans cause. D’autre part, notre bon sens nous permet de saisir intuitivement que si une cause est un processus complexe, élaboré, elle prend plus de temps qu’un processus simple ou réduit. Bien sûr, il nous faut nous méfier à tout moment de ce bon sens dont se servent les illusionnistes pour nous berner : contrairement à ce qu’il nous suggère, par exemple, lorsqu'une personne âgée tombe et se casse le col du fémur, il peut arriver paradoxalement que la chute ne soit pas la cause mais la conséquence de la fracture. Une fracture spontanée peut effectivement se produire (- souvent liée à l'ostéoporose) à cause d’un simple porte-à-faux ou d’un geste un peu brusque pour rétablir son équilibre et cette fracture entraîne alors la chute mais elle n’est pas sans cause. Il y a, dans ce cas-ci, une simple erreur d’interprétation due à notre bon sens qui ne saurait être unique.

      Le « sans cause apparente » de la définition ne fait que traduire les limites de la lucidité des auteurs et leur courte vue du moment avec, travaillant en arrière-plan, l’idée que quelque chose d’existant possède obligatoirement une ou plutôt des causes. C’est dire en fait que dans notre esprit, toute chose fait suite à un état de chose antécédent en s’inscrivant dans une arborescence touffue d'événements tous liés les uns aux autres. Le mystère de l’origine nous rend fous ; pourquoi refuser l’idée infinie d’une antériorité à toute antériorité ? Ce pourrait même être cyclique si on y tient : il suffirait quand on se demande d’où viendrait la mise en mouvement de ce cycle d’agrandir le cercle encore et encore. Par contre, nous sommes devenus incapables (- du moins dans nos contrées malgré quelques soubresauts) d’admettre sans broncher l’antique « génération spontanée » un peu courte, la magie du Moyen-Âge, les tours de passe-passe des illusionnistes, le Créationnisme simpliste qui obscurcissaient (- il n’y a pas si longtemps que ça) nos salles de classe et c’est plutôt bon signe.

Image sans fond de Paco Garzôn.

Image sans fond de Paco Garzôn.

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