Page du 16 janvier 2020 jour de couleur brune...

      Les hommes meurent libres et égaux en droits, mais pour ce qui est de naître… l’idée faisait pouffer Desproges !... Nait-on libre comme l’affirme la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen depuis 1789 ou le devient-on ? Et si la liberté, même relative, est une conquête, avons-nous tous les mêmes atouts pour l’emporter ? "Dieu a fait des hommes grands et d'autres petits, je les ai rendus égaux..." se vantait ce mégalo de Samuel Colt en faisant tourner son barillet. Il est vrai que depuis qu’il a inventé le revolver, il n’y a plus de grands costauds et les petits teigneux peuvent se venger. C’est un premier pas incontestable vers l’égalité, mais un décret philosophique affirmant qu’il faut que nous soyons tous les mêmes a rajouté à la confusion générale depuis quelques décennies. Si en général nous admettons aisément que nous sommes construits sur les mêmes schémas nous constatons qu’au résultat nous sommes tous différents et pas seulement socialement, culturellement ou sexuellement. Et c’est un bien : nos différences sont une richesse pour faire société. D’ailleurs, quand ma femme décrète que nous, les hommes, nous sommes tous les mêmes, je me demande comment elle a trouvé le temps de tous nous essayer…

      Si nous étions tous identiques, l'idée d'égalité n’aurait aucun intérêt. À ce que j’ai pu en voir, il me faut donc accepter que c’est parce que les êtres humains sont différents que l'égalité a dû être promue. Il fallait bien protéger les faibles : parce que, comme disait Colt, il y a des forts et des faibles, des malins et des imbéciles. On pourrait admettre que nous pouvons être égaux en potentialité sans être forcément égaux en qualité personnelle, mais cela ne peut se faire qu’en renversant des barrières anciennes mais solides. Ce serait alors une question de "devenir", pas "d’être". Au début du 16 ^ème siècle Erasme disait déjà "on ne naît pas homme on le devient"…  Le constructivisme d’une Simone de Beauvoir lui faisait répondre en clin d’œil qu’"on ne naît pas femme, on le devient" … mais il reste beaucoup de travail pour que les mentalités évoluent et l’acceptent vraiment. Des armées de féministes ont retroussé leurs jupes et sont parties au combat parfois torse nu mais c’est loin d’être gagné : le sexisme a la vie dure. Ça sent mauvais tout ça… Cette bonne part de la population accrochée à ces conceptions archaïques, appuyée par tous les intégrismes et pour qui l’égalité c’est de la merde, a des slips tachés de brun et en est restée à une sorte d’essentialisme qui cache à peine un  ségrégationnisme pur et dur.... " - La ségrégation, même si elle pue, n’a pas que du mauvais", riposterait un vieux suprématiste blanc : le Pentagone aux USA, construit en 1943 en ces temps de ségrégation, a deux fois plus de WC qu’il n’est besoin … La ségrégation a toujours un lien étroit avec l’intimité et ce n’est pas sans fondements : on voulait bien céder quelques espaces à partager mais jamais ses WC comme l’illustre superbement "La Couleur des sentiments", l’ouvrage de Kathryn Stockett qui a donné un excellent film. Effectivement, cette couleur est souvent marron car le retour de "bâton" y est une vengeance scatologique. Il n’y a pas d’autre réponse possible et ceux qui connaissent l’histoire seront d’accord…

       « Tous les êtres humains sont pareils, blancs, noirs, rouges, jaunes, riches, pauvres, croyants, athées, il existe en chacun de nous un petit trou qui sent mauvais » nous fait rire la sagesse africaine pas dupe en réduisant ironiquement l’égalité à ce plus petit dénominateur commun et intime. Ami riche et puissant, "là où est ton or, là est ton cul" rappelle notre vieille sagesse paysanne dans le même registre. En se pinçant le nez, Hervé Bazin observait de son côté que "du plus puissant monarque au plus beau des mannequins, ils ont tous huit mètres d'intestins... et on sait ce qu'il y a dedans...".  D’accord, "les hommes naissent libres et égaux en droit, mais après, ils se démerdent" concluait Jean Yann.