Page du 20 mars 2020 jour d'Apocalypse Now...

      De tous temps, les hommes ont redouté mais aussi aimé la guerre, son état d’exception excitant, l’adrénaline submergeant le corps, tous les tabous abolis, les viols, les butins, les possibles sans limites avec, poussant aux reins, un sentiment de toute puissance jouissif… Belzébuth, "Sa majesté des mouches", cette cruauté originale, est toujours là, juste sous la peau. C’est également le thème d’un des plus grands films de l’histoire du cinéma : "Apocalypse Now" de Francis Ford Coppola. Un commando est chargé de remonter le Mékong pour descendre le colonel Kurtz retourné vivre au fond de la jungle cambodgienne une vie de violence sans limite. Quand on fuit toute pensée ou bien au contraire, quand on le pousse au bout de sa logique en sombrant dans le nihilisme après l’expérience de l’horreur que la guerre vous a fait subir, on réactive cette violence inscrite dans ses tréfonds, elle vous fait du bien et elle devient addictive quand un primitif sentiment de liberté vous fait retourner à la sauvagerie. On dira de vous que vous êtes devenu fou mais si la société aseptisée et standardisée vous en prive, vous devez trouver des remèdes efficaces capables de calmer cette fièvre délirante. Dans une vie plus ordinaire qui n’est pas du cinéma, vous vous rabattrez sur la bande du quartier d’en face, vous vous engagerez dans une lutte à mort avec un rival commercial ou intellectuel, vous vous inscrirez dans des joutes politiques, bref vous rechercherai un moyen d’évacuer l’agressivité nécessaire qui nous a permis de nous en sortir jusqu’il y a peu. Comme pour toutes les addictions, ce n’est pas le fait de s’en voir privé qui est pénible, c'est l'impression de perdre quelque chose de vital, un os ou un œil.

(Photo prise lors du tournage d’Apocalypse Now)