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Cahier décharge Je ne sais pas ce que c'est, je le saurai quand j'aurai terminé. Et j'aurai terminé quand je saurai ce que c'est.

Page du 31 janvier 2021, jour de résurrection...

Denis Vallier
Page du 31 janvier 2021, jour de résurrection...

A notre époque de fake news, on a du mal à imaginer la venue d’un nouveau prophète authentique tant les faux pullulent. Mais écartons nos œillères, un miracle est toujours possible et donc si Dieu réapparaissait  à l’un d’entre nous, je le charge de lui demander des comptes... Cette puissance cosmique ne sait pas si le monde qu'elle a créé est réel ou fictif, et, apparemment, elle s'en contrefiche en nous laissant tomber. Mais je crains qu’il ne soit définitivement trop tard pour obtenir réparation : Dieu est mort d’après le diagnostic de Nietzsche. Le poids du remord, probablement... La levée de corps pose problème, est-il recyclable ? Si ce n’était que pour Nietzsche, passe encore, non, il est mort dans des conditions atroces des millions de fois pour des millions d’entre nous et son gigantesque fantôme plane sur la terre et les eaux : peut-être est-ce lui qui agite l’atmosphère et provoque des tempêtes monstrueuses ces derniers temps. On tient là la véritable cause du dérèglement climatique. Et que se dit ce fantôme ? En tendant bien l’oreille on pourrait percevoir les vents murmurer :

- Je suis mort… Mort de fatigue ? Non. De froid ? Non. De peur ? Non. Je suis mort de ma belle mort, mon cœur a cessé de battre tout simplement. Comment cela est-il arrivé ? Je n'en ai pas la moindre idée, mais une chose est sûre, je suis cliniquement mort. Comment puis-je en être sûr puisque vous m’entendez encore ? Très bonne question… tout d'abord je me trouve dans un état psychologique inédit, je ressens des choses nouvelles, rien de ce que je suis ou crois être à cet instant ne ressemble à quelque chose que j'ai connu auparavant. Je rêve ? En effet, ça y ressemble, j'ai émis cette hypothèse en premier lieu mais je suis bien trop conscient pour être dans un simple rêve : aucune des secondes qui s'écoulent ne m'échappe, je vis chaque intervalle entre chaque seconde comme une éternité. Oui je suis mort et je vis le temps qui passe, mon esprit est parfaitement éveillé. La différence, c’est qu’il n’y a plus de lumière, tout est noir, aucun son non plus, aucune sensation mais je suis conscient. Mon esprit n'a jamais été aussi actif et pourtant aucun élément extérieur ne vient le stimuler, je fonctionne en circuit fermé. Aucune couleur ne vient l'illuminer, aucun bruit ne vient l'éveiller, tout ce que je ressens provient de mon esprit. Je suis une entité isolée, je suis tout et je ne suis rien, le monde extérieur n'est plus, mais une chose est sûre : je suis. Je n'apprendrai plus rien de personne, plus aucune forme ne croisera mon regard, plus aucune main ne me fera signe. Je suis mon propre Univers, je détiens les clés de l'infini, même mort, je suis ce que j'ai toujours voulu être,  Dieu. Mais je me dis que si il y a une vie après la mort, ce serait bête qu’à la fin de l’autre vie, on meure aussi…

Une lente réflexion pourrait alors commencer : par le passé, Jésus est bien ressuscité… On ne meurt jamais très bien la première fois… et si le monde tel qu’on le connaît était le fruit de l'imagination d'un mort ? Rester dans cet état en retenant la leçon de ses erreurs lui permettrait alors de créer un nouveau monde bien mieux fait que le précédent : d’imaginer ses habitants un par un, de respecter leur personne, de réellement embellir le fil de leur vie, de faire preuve d’empathie, d’enfin ressentir leurs émotions sans pour autant avoir pouvoir de vie ou de mort sur eux. Tant de choses s'offrent à lui : même mort, il détient tant de pouvoirs… même mort, il est toujours Dieu.

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